C'est un article des Echos publié en début de semaine dernière par Les Echos que j'ai vu passer un grand nombre de fois. Une tribune signée Bernard Darty au titre pour le moins provocateur : Ne laissons pas Amazon détruire le commerce traditionnel.
Les réseaux sociaux étant ce qu'ils sont, et les hommes ce que nous savons (de Marseille, bien sûr) il a été publié avec en commentaires, tout, et son contraire ! Les pôles de ces réactions s'articulent autour de ces résumés :
Monsieur Darty co-fondateur de l'entreprise éponyme défend son business après lui-même avoir détruit des petits commerçants ! C'est la chaîne alimentaire, il fallait innover avant !
Finalement, le reproche fait à Amazon n'est-il pas d’être un excellent commerçant qui centre sa stratégie sur les services, l’écoute de ses clients et la diversité de son offre pour équilibrer sa marge ?
En passant par le Président Momboisse qui résume d'un sourire : 50 ans après “ne laissons pas Carrefour détruire le petit commerce”
Au-delà de ces réactions, le point de vue de Bernard Darty suscite plusieurs remarques en moi. Je vous laisse lire l'article et on en reparle ensuite.
Tout d'abord, créer des géants de la vente n’est pas interdit et nous l’avons bien fait avec Carrefour, Auchan, etc. Mais si la vente à perte est interdite, c’est sans doute pour éviter que la création de géants ne se fasse pas à cause de l’adoption d’un meilleur service, mais à cause de la destruction de la complétion par l’argent. La vente à perte concerne uniquement le prix d’achat vs le prix de vente. On peut créer, en particulier dans la vente en ligne, des pertes à cause des services, comme la livraison expresse, par exemple, ce qui à nouveau déstabilise le marché.
Ensuite, il est sans doute très difficile de légiférer car où se situe la limite entre des services qui auront toujours le même prix et de l’investissement dans des infrastructures dont l’amortissement permettra la diminution rapide des coûts ? Difficile de répondre !
A propos d’Amazon Web Services, AWS pour les intimes, il me semble illogique que l’activité florissante d'AWS couvre légalement les pertes de l’activité e-Commerce. Mais alors, on retombe dans le cas précédent, ou comment et où trouver la limite.
Pour ce qui concerne des services complémentaires à Prime, il est évident que lorsqu'on a des milliers de clients pour un service X, et que l’on a un service Y immatériel (donc dont le cout de production est faible vs le cout d’acquisition), on n’a plus qu’à offrir Y (au détriment des ceux qui ne savent faire que des Y’, Y’’ et qui ont les couts d’acquisition à payer)
Mais ça, il faut être logique et intellectuellement honnête, c’est de bonne guerre !
Au final, la vérité viendra tout d'abord des consommateurs :
Oui, acheter sur Amazon, c’est vraiment pratique, et que celui qui ne le fait pas régulièrement, jette la première pierre… En tant que client, on rêve que toutes les boutiques en ligne proposent de vrais choix dans les produits, les tarifs des produits, les options de paiement, de livraison etc. On veut tous, tout le temps, même si on admet la chose impossible, le beurre, l'argent du beurre et le sourire de la crémière.
Ceci dit, malgré toutes les qualités dont se pare Amazon pour certains, on voit déjà aux USA de plus en plus de clients qui préfèrent délibérément acheter chez un marchand en direct plutôt que de passer par Amazon. Pour la possibilité de contact direct et le service personnalisé, entre autres. Bien que résidant en France, c'est déjà mon cas. Je m'explique : si l'on prend la prestation dans sa globalité, le service client d’Amazon est réellement proche de la perfection, mais au détriment de la relation client.
Récemment par exemple, j’ai acheté un produit pour un de mes enfants qui était « un peu » défectueux. Je suis certain qu’en parlant au marchand on aurait réglé cela en quelques échanges.
La réponse d’Amazon a été « retournez-nous le produit, et on vous rembourse ».
En théorie, c’est parfait. En pratique, c'est 30 minutes de queue à la poste le samedi pour retourner le produit trop gros pour un autre type de retour, deux semaines pour récupérer un nouveau produit d’un autre marchand, 15 jours pour être remboursé et, au final, un cadeau finalement dispo 4 semaines plus tard que prévu …
Quand le process remplace le bon sens cela donne cet écart de compréhension où le mieux est l'ennemi du bien. Et on peut d’ailleurs l’appliquer à beaucoup de sujets dans nos entreprises… le process est nécessaire, mais trop de process tue l’initiative ; et le commerce, ne l'oublions pas, c’est finalement prendre une initiative pour satisfaire les clients !
Au final, donc, la vérité viendra tout d'abord des consommateurs... mais aussi des marchands.
Les marchands comprennent de plus en plus que vendre uniquement sur les places de marché n’a pas de sens.
Un marché, dans la vraie vie, c’est un flux. On y créé une relation éphémère avec les gens du coin, qui peuvent changer de lieu, alors qu’on se rend fidèlement dans une boutique qu’on apprécie.
En résumé, d'un côté, les marchands profitent de la puissance d’accès aux clients d’Amazon, mais de l'autre, ils subissent le diktat du « client a toujours raison ». L'un compense-t-il l'autre ?
Un de nos marchands Oxatis citait les crèmes solaires 2017, retournées ouvertes en janvier 2018 pour remboursement par exemple, avec un choix à faire, en plus du fait que le produit devait remboursé au client, de payer pour le transport de retour de l’entrepôt Amazon vers le marchand, ou de payer pour la destruction du produit.
Le fait est que ce genre d'aberration calme plus d’un marchand !
En conclusion, j'ajouterais que le marché se stabilisera grâce à des consommateurs éduqués et à des marchand qui discerneront mieux les produits à vendre ou pas sur places de marchés, et sur lesquelles.
Ainsi, et c'est la part à méditer, pourrait assez rapidement arriver le jour où Amazon courtisera les producteurs pour vendre leurs produits si plus aucun marchand ne souhaite subir le laminage des marges...
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